Notre smartphone nous rend-il plus bête ? Pas exactement !
Voilà plus de 10 ans que le smartphone s'est introduit dans notre quotidien et que, d'une certaine façon, il contrôle de manière partielle (voire totale pour certains) nos rapports sociaux. Certains considèrent que le smartphone est à l'origine de tous les maux de notre société, qu'il est la cause de sa division et, plus intéressant encore, qu'il nous rend plus bête. S'il est vrai que le smartphone a une forte influence sur notre comportement, il faut tout de même nuancer ces conclusions.
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Ni innocent, ni coupable
Pourquoi le smartphone n'est-il pas innocent ?
De nombreux problèmes sont associés à l'utilisation des smartphones : troubles de l'attention, incapacité à se débrouiller, addiction, automatisation des comportements, rapports sociaux parfois plus virtuels que réels, etc. Je ne me ferai pas l'avocat du diable en prétextant que ces problèmes n'existent pas ou qu'ils n'ont aucun lien avec le smartphone.
Notre utilisation du smartphone, souvent (trop) intensive, affecte bien entendu notre comportement et notre personnalité. En fonction des individus, les conséquences peuvent être inexistantes ou légères, mais dans certains cas elles peuvent être extrêmes.
Le smartphone est-il donc coupable ?
Si vous vous faites arrêter par la police parce que vous roulez à 200 km/h, direz-vous que c'est la faute de la voiture ? Après tout, elle peut rouler très vite, donc pourquoi blâmer l'utilisateur ? La situation est quelque peu similaire avec les smartphones. Certes, la conduite est réglementée et il est interdit de rouler trop vite, mais cette règle est basée sur le bon sens : c'est dangereux. Cette réglementation n'existe pas sur smartphone mais nous retrouvons la même logique : si vous ne faites pas attention à ce que vous faites, les choses peuvent devenir dangereuses.
Certes, si vous n'avez pas de smartphones vous ne serez pas affecté par le problème. Ceci dit, si vous utilisez votre smartphone intelligemment, vous ne le serez pas non plus. Si vous passez vos journées à discuter sur les réseaux sociaux et les plateformes de messagerie instantanée, y compris lorsque vous êtes dans des situations où vous devriez rester concentré(e), vous serez bien évidemment plus sujet(te) à avoir des problèmes, notamment des accidents. Ne pas mettre toutes les chances de son côté est de la pure bêtise, ce qui donne bien évidemment raison à ceux qui considèrent que l'utilisation du smartphone nous rend stupide.
Qui est donc responsable, si les smartphones sont innocents ?
Les fervents défenseurs de la théorie de l'abêtissement se basent sur des conséquences concrètes. Certains utilisateurs de smartphones illustrent malheureusement assez bien leurs propos mais, j'ose le croire, ils ne sont qu'une minorité. Quoi qu'il en soit, il existe une multitude de facteurs expliquant leur comportement, le smartphone est bien entendu l'un d'entre eux (la proportion change d'un individu à l'autre).
Les accros à la communication
Ils ont besoin de communiquer en permanence. Que ce soit par communication texte, par messages vocaux, appels, images ou vidéos, ils ont du mal à s'arrêter. La plupart d'entre nous ont tendance à sortir notre smartphone pour s'occuper lorsque l'on est dans le métro ou seul, mais certains ont besoin sans cesse d'échanger. Dès qu'ils ont une minute libre, ils contactent quelqu'un pour raconter quelque chose qui, d'ailleurs, n'est pas toujours intéressant.
Faut-il blâmer le smartphone ? Certes, il permet d'assouvir ces pulsions, mais le problème est plus profond : il s'agit d'un besoin de communication permanente. En soi, ce n'est pas foncièrement un problème mais cela en devient un au volant ou même tout simplement lorsque l'on marche dans la rue, les yeux rivés sur son écran, sans même regarder où l'on va.
Les "assistés"
Le grand avantage des smartphones, c'est qu'ils nous simplifient la vie. Peut-être même un peu trop, puisqu'ils nous permettent de tout faire vite. La course à la productivité et au rendement (très représentative de notre société, d'ailleurs) a son prix : si le smartphone réfléchit pour nous, nous n'avons plus à le faire. Ainsi, au lieu de travailler notre sens de l'orientation lors de courts trajets en ville, nous utilisons des GPS pour savoir où aller.
Il m'arrive bien entendu à moi aussi d'avoir un comportement idiot. Dernièrement, j'étais parti manger dans un parc avec des amis et le ciel commençait à s'obscurcir. Etrangement, au lieu de regarder le ciel gris foncé qui annonçait très clairement la pluie dans les prochaines minutes, nous avons consulté une application météo qui, sans surprise, nous a indiqué qu'un orage arrivait et qu'il allait pleuvoir dans cinq minutes.
Les exemples font légion, mais l'interprétation est selon moi plus complexe qu'elle ne le paraît. Personne n'oblige les gens à utiliser leur smartphone et, généralement, ils agissent par simplicité, pour ne pas avoir à réfléchir. C'est là que se situe le véritable problème, selon moi : à vouloir tout faire le plus vite possible, nous rentrons dans un système d'abrutissement. Ceci dit, nous pouvons voir ce phénomène bien au delà des smartphones, surtout lorsque l'économie s'en mêle.
Personne n'oblige les gens à utiliser leur smartphone
Nous trouvons également bon nombre d'utilisateurs qui utilisent beaucoup moins leur mémoire. Pourquoi chercher à se rappeler des dates d'anniversaire ou même chercher à se rappeler certaines idées alors que l'on peut tout noter sur son smartphone et, encore plus pratique, lui dire de nous rappeler les choses lorsque l'on pourrait en avoir besoin ? Bien sûr, c'est pratique, mais notre cerveau lui il s'habitue à fonctionner différemment.
En quoi l'utilisation de notre smartphone peut-elle nous affecter ?
Nous pouvons voir ce problème sous plusieurs angles. Tout d'abord, il y a la perspective comportementale/sociologique abordée ci-dessus, mais diverses études s'intéressent sur des aspects purement scientifiques, généralement axés sur la biologie/biochimie.
L'effet négatif du multitâche
La capacité à faire plusieurs actions en même temps n'est pas un concept nouveau (il paraîtrait même que les femmes fassent cela mieux que les hommes). Ceci dit, notre société moderne de manière générale et les smartphones en particulier ont développé un peu plus ce concept. Non seulement beaucoup de personnes utilisent leur smartphone en plus d'une autre activité (notamment la conduite, par exemple prendre une photo et envoyer un Snap tout en conduisant), mais nous avons également la possibilité de fractionner notre écran afin de faire deux choses en même temps. Pour information, cette fonction sera disponible nativement sur Android N.
Plusieurs études montrent qu'être multitâche a des conséquences assez négatives sur le cerveau. Si les origines du phénomène sont aussi multiples que discutables (notamment en lien avec la nature humaine qui nous pousserait à toujours chercher la nouveauté), les effets négatifs sur notre cervea sont indéniables. Un neuroscientiste du MIT, Earl Miller, explique que le multitâche représente simplement le passage extrêmement rapide d'une tâche à une autre (et non l'exécution simultanée des deux), et il précise également qu'à chaque fois que nous le faisons, il y a des conséquences cognitives. Des facteurs biochimiques entre en compte, de la dopamine est libérée et bien entendu notre cerveau en demande toujours plus, ce qui nous motive bien entendu à continuer.
David Meyer, chercheur à l'université du Michigan, s'intéresse également au sujet et souligne le rôle des 'gadgets électroniques', comme il les appelle, dans la popularisation du multitâche. Il précise également l'importance des différentes zones du cerveau qui sont requises pour le multitâche, si diverses zones sont activées, il y aura une perte plus ou moins considérable en qualité. De plus, il souligne que le multitâche et le stress sont liées assez étroitement, en particulier pour le travail.
Le mystérieux effet des écrans tactiles
En 2014, une équipe de recherche suisse a mené une étude sur plusieurs volontaires. Plusieurs d'entre eux devaient utiliser un téléphone classique, les autres avaient à disposition un smartphone (avec un écran tactile). La recherche montre clairement un changement chez les personnes ayant utilisé un écran tactile : la forme et le fonctionnement du cortex somato-sensoriel est modifié.
Nous ne savons pas encore si ceci a des conséquences négatives, notamment sur notre quotient intellectuel. De nombreuses activités entraînent des modifications, notamment la pratique d'un instrument de musique. Toutefois, il est précisé que la plasticité du cortex somato-sensoriel est associé à des douleurs chroniques. Des recherches complémentaires fourniront de plus amples éléments de réponse.
Il ne fait donc aucun doute que les smartphones ont un effet sur notre cerveau et, de manière plus générale, sur notre comportement. D'une certaine façon, ils participent à un processus d'abêtissement mais ils n'en sont que l'un des nombreux acteurs.
Mes filles (10 et 12 ans), bien qu'ayant de fortes aptitudes intellectuelles et douées à l'école, ne prennent plus le temps de lire voire se refusent à faire une recherche dans un dictionnaire (ah la magie recherche Google !). Elles sont parti 12 jours à l'étranger sans leur smartphone et on aura dit des droguées en plein sevrage !! Effrayant. Du coup, j'impose des règles strictes d'utilisation des "crans (plages horaires et couvre-feu électronique). Ca fiche la trouille de voir une telle addiction !
Effectivement ce n'est jamais la science qui est en cause, ni la technologie. C'est la façon dont nous nous approprions ces nouveaux moyens de communication... et notre capacité à résister à plus ou moins brève échéance, à l'addiction (ou à la mode). Cela dit l'attrait a toujours été une composante majeure du Progrès. A nous de savoir exactement ce qu'on attend du smartphone, et de le choisir en conséquence.
Excellent article, sur le fond et sur la forme
Excellent article qui fait réfléchir. Récemment je me suis rendu qu'avoir trop d'application me ralentissait : wunderlist trello Google agenda keep Evernote one note plus deux boîtes mail cloudmagic et inbox ( j'arrive pas à choisir) et bien au final j'ai tout viré j'ai gardé que keep et Spaces de Google et je n'ai pas d'application météo mais j'ai gardé les deux boîtes mail ( peux pas choisir) ....
nous faisons moins d'effort intellectuel, c'est vrai. Moins de calcul mental, moins de vérification d'orthographe. .. la calculette ou le correcteur intellisense le fait pour vous.
Répétition des tâches. pas besoin d'ordonnancer. On le programme une fois et on appuie sur repeat.
Les enfants d'hier en phase d' apprentissage apprenaient à coordonner les gestes, reconnaître les situations, ils s'amusaient de tout. c'était une période de découverte formatrice et propice au développement du cerveau.
Aujourd'hui, on fait plus de choses en même temps, plus vite. Et on stresse quand un petit rien vient dérégler la belle mécanique. Pas bon pour le cerveau ça.
Alors quoi ? réfléchissons à ce qui est bon pour notre épanouissement personnel