Test de My Time at Portia, notre jeu Android/iOS du mois
My Time at Portia est le jeu mobile du mois que j'ai sélectionné et testé pour vous. D'abord sorti sur console et PC, My Time at Portia est disponible sur Android et iOS au prix de 8 euros et s'inpire fortement de jeux de simulation de vie comme Animal Crossing ou Stardew Valley.
Après l'avoir délaissée durant mes congés, je reprends ma série du jeu mobile du mois dans laquelle je vous livre le test complet d'un jeu vidéo pour smartphone Android et/ou iPhone. Vous pouvez d'ailleurs en retrouver le premier épisode, consacré à un jeu narratif d'Arte intitulé Unmaze.
Ce nouvel épisode est donc consacrée à My Time at Portia, un jeu développé par Pathea, un studio indépendant chinois qui mêle beaucoup de genres, du RPG au simulateur de vie en passant par la survie et la gestion. C'est un portage mobile très réussi selon moi, qui propose une durée de vie étonnamment longue pour un jeu mobile et vous plonge dans un monde ouvert assez immersif, le tout conditionné par un gameplay qui peut vite devenir laborieux dans le sens littéral du terme.
Sommaire
- Quel type de jeu My Time at Portia est-il?
- Histoire (sans spoilers): Artisan Simulator 2021 dans un monde post-apo
- Gameplay: Le travail, c'est fun (?)
- Graphismes: Entre the Wind Waker et Wii Sports
- Conclusion
Quel type de jeu My Time at Portia est-il?
En une phrase, je dirais que My Time at Portia est un RPG en vue à la troisième personne doublé d'un jeu de gestion de ressources dans un monde ouvert en 3D avec un système de combat, des phases de plateforme et de la simulation de vie. Ce genre de jeux est assez difficile à définir puisqu'il mêle plusieurs éléments de genres différents intercalés en plusieurs couches.
Vous incarnez un personnage que vous pouvez créer de (presque) toutes pièces à la manière d'un jeu de rôle (RPG) classique et vous vous déplacez dans un monde ouvert composé de plusieurs zones en vue à la troisième personne.
Dans ce monde ouvert, vous incarnez un(e) artisan(e) qui reprend l'atelier de son père dans la ville fictive de Portia et devient ainsi l'un des constructeurs officiels engagés par la municipalité. C'est là qu'entre en jeu la seconde couche du jeu: la gestion. Chaque construction qui vous est assignée nécessite des ressources bien précises qu'il faudra miner, bûcheronner ou fabriquer. Votre personnage a une barre de vie et d'endurance qui se vident à mesure que vous accomplissez vos tâches. Et le jeu dispose d'un cycle jour/nuit qui va conditionner votre avancement.
On en arrive à la troisième couche: le monde ouvert. La carte de Portia est assez vaste et son monde se veut cohérent et immersif. Cela veut dire que chaque PNJ (personnage non-joueur) autour de vous a sa personnalité, ses préférences, son travail et son emploi du temps. Certains magasins ou bâtiments ferment à une certaine heure, un personnage à qui vous souhaitez parler ne se trouvera pas forcément au même endroit en fonction de l'heure dans le jeu.
L'avant dernière couche de My Time at Portia est une couche de simulateur de vie. Votre place dans la communauté de Portia et vos relations avec ses habitants évoluent. Plus vous remplissez de contrats, plus la réputation de votre atelier s'accroît et plus vous recevez de récompenses pour améliorer votre équipement et votre maison. Vous pouvez devenir amis avec un PNJ, l'inviter à un rendez-vous puis devenir amants voire même vous marier et avoir des enfants (et des animaux de compagnie).
On en vient à la dernière couche: le jeu d'aventure. Le jeu propose un système de combat avec des boss, des donjons, quelques phases de plateforme etc... Il tente aussi de récompenser le joueur lorsque ce dernier explore la carte, en cachant quelques coffres de ressources dans certains recoins. My Time at Portia dispose aussi d'un fil conducteur narratif, il y a bien un scénario dont chaque chapitre est ponctué par une construction particulièrement difficile, vous poussant à améliorer votre atelier et votre équipement.
Histoire (sans spoilers): Artisan Simulator 2021 dans un monde post-apo
Portia est une ville portuaire sur la côte de l'océan occidental et membre de l'Alliance des citées libres, une confédération de plusieurs citées-Etats formée pour se protéger politiquement et militairement de l'empire de Duvos. Mais l'univers de My Time at Portia est cependant bien moins sérieux que ce que laisse présager ma description.
L'intrigue de base consiste simplement à débarquer en ville pour reprendre l'atelier de votre père, parti à l'aventure dans des contrées lointaines. Vous devenez donc "constructeur" de la ville, engagé par la Mairie et encadré par la Guilde des constructeurs, autour de laquelle semble toute l'économie et l'industrie locales semblent tourner.
Mais il existe également une sous-intrigue qui se déroule en filigrane à mesure que vous progressez dans le monde ouvert qu'est Portia. En effet, vous apprenez rapidement que Portia a été fondée sur les ruines d'une ancienne citée rasée de la carte après une "calamité" survenue 330 ans auparavant. Ce cataclysme a causé un Âge des ténèbres plongeant le monde dans le chaos. Ce n'est que 200 ans plus tard (100 ans avant votre ère, donc) qu'un héros nommé Peach a sorti le monde des ténèbres.
Mais un peu comme dans Horizon Zero Down, toutes proportions gardées, la société a régressé technologiquement dans une sorte de présent anachronique qui ignore presque tout de son glorieux passé hormis quelques reliques de machines et d'IA perdues qui semblent être au centre d'un mystérieux complot...
Je ne peux en dire plus sans risquer de vous spoiler. Personnellement, je n'ai pas encore fini l'histoire malgré mes 75 heures passées sur le jeu. Le pitch de base est assez nian-nian mais ce n'est clairement pas l'argument de vente-clé du jeu. Je regrette cependant que l'histoire soit trop souvent en toile de fond, éclipsée par les longues phases de récolte de ressources et de construction. "Farmer" pendant deux jours pour débloquer une cinématique de 15 secondes m'a frustré plus d'une fois durant mon test.
Gameplay: Le travail, c'est fun (?)
Le gameplay de My Time at Portia est assez varié sur le papier mais aussi très répétitif. Comme expliqué plus haut (avec les multiples couches) il faut distinguer plusieurs phases: le craft (construction etc...), l'incrémental, la simulation de vie/RPG et le combat.
Les phases de craft
Dans My Time at Portia, vous allez passer 80% de votre temps à faire des allers-retours entre la ville et votre atelier. L'objectif principal tout au long du jeu est la récolte de ressources. Les ressources de base se divisent en 3 catégories: les minerais, les métaux et le bois. Pour obtenir du minerai (cuivre, fer, bronze...) il faut aller à la mine. Pour obtenir des métaux, il faut faire fondre le minerai dans un fourneau. Pour obtenir du bois, il faut couper des arbres sauvages ou vous rendre à la ferme arboricole.
Les ressources de base peuvent aussi être transformées à l'aide de machines. Fourneaux, scieries, broyeurs... vous devez fabriquer ces machines sur votre poste d'assemblage. Ce poste est une sorte de hub, une plateforme via laquelle vous pouvez tout construire à condition d'avoir appris le bon plan (ou diagramme).
Certaines constructions nécessitent des outils ou des pièces en particulier. Vous devez donc les fabriquer sur votre établi, là aussi avec les ressoures récoltées. En gros, toute votre progression va reposer sur votre capacité à gérer vos ressources et optimiser votre production. Le jeu intègre aussi une notion d'argent, la monnaie locale étant appelée Gol, qui sert à acheter des vêtements, des ingrédients, outils, meubles, décorations pour améliorer vos stats de personnage.
Enfin, la dernière ressource est l'endurance de votre personnage. Chaque coup de pioche pour miner ou coup de hâche pour abattre un arbre vous coûte des points d'endurance. Lorsque votre barre est vide, vous ne pouvez virtuellement plus rien faire de productif. Vous devez alors soit consommer un aliment/boisson pour restaurer votre endurance ou aller dormir. Le déblocage de certaines compétences ainsi que l'amélioration de certains outils permet d'économiser vos dépenses en endurance.
Les phases incrémentales
Une notion très importante dans My Time at Portia est le temps. Le jeu dispose d'un cycle horaire, jour/nuit ainsi que de saisons et d'intempéries. Le temps passe littéralement dans le jeu de sorte qu'après mes 75 heures de temps de jeu "irl" (dans la vraie vie), il s'est écoulé plus d'un an en temps "in game."
Cet élément est très important pour deux raisons. La première est que votre personnage a besoin de dormir. Après une certaine heure, en général 2h30 du matin, vous serez forcé d'arrêter ce que vous faites et automatiquement téléporté dans votre lit pour dormir avant de vous réveiller le lendemain matin.Ce cycle s'applique d'ailleurs aussi aux PNJ. Ils sont chacun un emploi du temps quotidien.
Mais ce cycle est aussi important pour votre production. En effet, lorsque vous faites fondre un minerai ou que vous faites couper une planche de bois, cela prend du temps en jeu. La seule chose à faire est donc d'attendre. C'est un terme très difficile à expliquer en français, mais en anglais on parle d'un "idle game".
Il faut comprendre le mot "idle" comme "inactif". En gros, certains éléments du gameplay ne nécessitent pas d'interaction avec le joueur ou qu'il soit proactif. Cela peut s'avérer assez frustrant, surtout lorsqu'il vous manque juste une pièce pour finir une construction mais que sa fabrication prend 5 heures in-game (soit 5 minutes en moyenne en vrai).
Les phases de RPG et simulation de vie
La première chose que vous faites en lançant My Time at Portia pour la première fois est de créer votre personnage de la tête aux pieds, comme dans un RPG classique. Votre personnage dispose ensuite de "statistiques" que vous pouvez améliorer en débloquant des points de compétence à mesure que vous progressez.
Vous pouvez fabriquer et améliorer vos armes et vos outils pour collecter toujours plus de ressources et vaincre des ennemis toujours plus puissants. On est plus sur du light-RPG qu'autre chose, l'arbre de compétences n'étant pas très poussé. Mais cela apporte un peu plus d'aspérités à la courbe de progression, c'est une incitation supplémentaire à se plier à la routine imposée par le craft du jeu.
L'autre composante, celle de ma simulation de vie, correspond à toutes les interaction sociales que vous entretenez avec les autres habitants de Portia. Concrètement, à chaque fois que vous construisez quelque chose pour un personnage, vous gagnez des points de relation qui font évoluer votre lien social.
Chaque personnage propose par ailleurs une liste d'interactions en dehors de toute quête ou mission. Vous pouvez donc à n'importe quel moment discuter avec un PNJ, lui offrir un cadeau, jouer à pierre-feuille-ciseaux, vous battre en duel ou prendre une photo ensemble. Là aussi, ces interactions vous font gagner des points de relation.
À mesure que votre relation progresse, vous pouvez passer du statut d'inconnu à connaissance, puis ami et enfin amant. Certains personnages devenus amis se pointeront même à votre porte pour vous proposer un rendez-vous. Et lorsque vous atteingez un certain niveau de relation avec votre amant, vous pouvez le ou la demander en mariage et même avoir des enfants.
C'est une dimension totalement cucul la praline qui ne m'intéresse pas en général, mais elle a son importance. Chaque personnage vous procure des avantages distincts en fonction de votre niveau de relation, par exemple. Vous pouvez même découvrir les préférences d'un personnage pour fabriquer et offire des cadeaux qui vous feront gagner davantage de points de relation.
Le combat
Les phases de combat ne sont pas les plus prépondérantes dans le gameplay de My Time at Portia et ce n'est peut-être pas une mauvaise chose. Vous disposez d'un arsenal assez limité consistant en une épée et des armes à projectiles (débloquées plus tard dans le jeu).
Le système de combat est ultra simpliste avec un seul bouton d'attaque qu'il faut marteler pour venir à bout des ennemis. Certains types d'ennemis ont des patterns (des déplacements et des attaques pré-enregistrés) différents ce qui apporte un peu de variété, tout comme les boss de fin de niveau. Et vous disposez aussi d'un bouton de roulade pour esquiver.
Mais trop souvent, je me retrouvais simplement à tapoter machinalement mon écran comme un débile sans jamais avoir à esquiver quoi que ce soit. Les combats n'interviennent que dans les donjons bien que vous puissiez rencontrer des ennemis sous la forme d'animaux sauvages dans la nature. Et honnêtement je me dis que c'est peut-être tant mieux. J'ai trouvé les différents donjons très oubliables et les combats franchement répétitifs. C'est clairement la partie du gameplay que j'ai le moins apprécié.
Conclusion
Comme la longueur de cette section en témoigne, le gameplay de My Time at Portia est assez varié, sur le papier. Le jeu mélange beaucoup de genres et il parvient très bien à vous rendre accro avec ses boucles de gameplay bien huilées. Mais, ce cycle de métro-boulot-dodo peut aussi vite devenir vicieux et je dirais même érintant parfois avec des constructions qui prennent une éternité et demandent beaucoup trop de ressources.
Le jeu a cette fâcheuse tendance à devenir un travail, quelque-chose de plus laborieux que divertissant par moments. Mais on peut aussi simplement se balader et explorer les environs de Portia. J'ai trouvé le monde ouvert très beau et j'éprouvais un véritable sentiment de satisfaction en voyant certaines de mes constructions venir moderniser la ville.
Graphismes: Entre the Wind Waker et Wii Sports
Visuellement, My Time at Portia me rappelle beaucoup Oceanhorn 2, le célèbre jeu mobile qui est aussi une copie carbone de Zelda The Wind Waker. La charte graphique un peu cartoon et le world design qui mêle une nature et une faune fantasy ainsi qu'un envionnement médiéval à des éléments urbains en ruine et des technologies déchues confèrent au jeu une ambiance vraiment intéressante.
La ville de Portia semble vivante avec des bâtiments aux intérieurs modélisés, ses paysages qui changent au gré des saisons et des intempéries tout comme ses personnages qui vivent leur vie et dont on finit par connaître les habitudes. Bon, il ne sont pas super bien modélisés et ressemblent plus aux personnages Mii de Nintendo que ce que les visuels officiels du jeu ne laissaient présager.
Le jeu connaît également quelques soucis de stabilité, surtout lorsque vous changez de zone en passant de l'extérieur d'un bâtiment à l'intérieur et vice versa, il se peut que le framerate plonge légèrement. Mais je n'ai pas l'impression que les soucis techniques étaient aussi sérieux que ce que j'ai pu lire dans d'autres tests.
Pour mon test, j'ai joué à My Time at Portia sur un OnePlus Nord 2 doté du SoC MediaTek Dimensity 1200 couplé à 12 Go de RAM. J'ai fait tourner le jeu avec les graphismes en "élevé" bloqués en 60 FPS. Mais je pense que sur un smartphone milieu de gamme, il faudra revoir ses ambitions graphiques à la baisse je pense. Je dirais, à titre de comparaison, que My Time at Portia est au moins aussi gourmand en ressources qu'un jeu comme Genshin Impact.
Dans l'ensemble, j'ai trouvé le jeu visuellement convaincant. Il n'est pas réaliste mais ce n'est pas son objectif. La recette n'est pas la plus originale non plus, mais pour un jeu aussi vaste et en particulier sur smartphone, j'ai trouvé l'expérience plus que satisfaisante.
Combiné à la cohérence ou plutôt au dynamisme du monde ouvert qui change et évolue sous vos yeux à mesure que vous progressez, Portia est un bel endroit pour s'évader un peu. Mais pas trop longtemps non plus parce qu'il y a des barres de fer à faire fondre et des planches en ferbois à couper qui vous attendent!
Conclusion
My Time at Portia vaut-il son prix de 8,99 euros sur le Google Play Store et 7,99 euros sur l'App Store d'Apple?
Rien qu'en termes de longévité, je dirais que oui. C'est très très rare pour un jeu mobile- et un jeu solo qui plus est- de proposer une histoire qui tient plus de 10 heures. Certes la durée de vie est "artificiellement" prolongée par le système de craft qui bloque la progression tant que vous n'achevez pas une certaine construction. Mais il y a des gens, comme moi, qui apprécient vraiment ce côté laborieux du farming et qui adorent accomplir toutes les petites quêtes secondaires plutôt que de fonder tout droit dans la quête principale.
Mais j'en viens au penchant négatif de ce type de gameplay. Si vous attachez plus d'importance au scénario ou à l'action, My Time at Portia va très vite vous frustrer. Je dirais même, sans exagérer que vous risquez le burn out! J'ai parfois été sérieusement frustré par les boucles de gameplay durant les phases de craft.
Ajoutez à celà le rythme du jeu et son cycle horaire et on a vraiment l'impression d'être au boulot. C'est à la fois un bon moyen de rendre les joueurs plus accro au jeu, en particulier les complétionnistes comme moi qui veulent le finir de bout en bout. Mais c'est aussi une approche qui va décourager les joueurs les plus casuels, selon moi.
Après, je précise tout de même qu'on peut vraiment optimiser voire carrément automatiser sa production après le second tiers du jeu. Il existe donc certaines mécaniques qui vont venir vous "soulager" du train train qu'il faut néanmoins subir au début. Selon moi, le jeu en vaut la chandelle.
Je peux compter sur les doigts de main les jeux pour smartphone qui proposent un monde ouvert aussi vaste et une durée de vie aussi longue parmi les innombrables titres sortis ces dernières années. My Time at Portia est un très bon portage et un très bon jeu, tant qu'on n'en fait pas un métier.