Saviez-vous ce que l'on peut faire réellement dans un monde virtuel ?
On l'oublie parfois mais il faut savoir que la réalité virtuelle a le mérite d'être à la fois futuriste et rétro. Ready Player One, le blockbuster hollywoodien de l'an dernier sur le thème de la VR, illustre très bien cela en se penchant sur la nostalgie des années 80. Bien avant lui, Matrix se penchait déjà sur le thème d'une réalité illusoire.
Pourtant, il y a déjà longtemps que l'idée de communautés virtuelles est présente. Depuis que nous avons inventé Internet, en réalité. Comme je ne suis plus tout jeune, je peux dire fièrement que mon premier point de référence pour la réalité virtuelle sociale est le roman Snow Crash de Neal Stephenson de 1992, qui a inventé le terme "Metavers" pour désigner l'environnement urbain virtuel photoréaliste dans lequel les personnages pouvaient socialiser. Plus loin encore, le Neuromancien de Willion Gibson s'intéressait à ce qu'il appelait le "cyberespace" (aujourd'hui synonyme de l'ensemble de l'Internet).
Plusieurs mondes virtuels se sont inspirés de cette fiction (les plus célèbres sont Second Life et certains MMO comme Ultima Online ou World of Warcraft) mais ils n'existaient que sur nos écrans d'ordinateur. Maintenant, nous avons le matériel dont les auteurs d'antan ne pouvaient que rêver. J'ai décidé d'explorer les mondes sociaux virtuels pour pouvoir faire un bilan de la situation. D'abord, en contactant un spécialiste de l'immobilier virtuel et ensuite, en allant en boîte.
Un rêve numérique
Ma première étape a été de retrouver une vieille connaissance. Lors du Disrupt Berlin 2017, j'ai rencontré les créateurs du monde virtuel Somnium Space qui construisaient un monde virtuel pour des activités sociales et ludiques, mais aussi pour y faire du business. Comme dans Second Life, vous pouvez y acheter une propriété. J'étais curieux de voir ce que cela devient.
A titre d'information, la plupart des expériences sociales de réalité virtuelle (j'hésite à les appeler des jeux) sont disponibles en téléchargements gratuits sur Steam, donc vous n'avez rien à perdre à leur donner un essai. Somnium Space est l'une d'entre elles, je l'ai téléchargé et plongé pour rejoindre l'équipe du jeu.
C'est une petite ville au bord de la mer, avec quelques quelques plus comme un planétarium, un stade et une île suspendue dans les airs, apparemment attachée au sol par un long câble. En tant que corps flottant avec une tête et des mains, les avatars des joueurs sont limités à une poignée d'options et d'accessoires.
S'il y a une chose que Somnium Space fait bien, c'est l'interface utilisateur et les contrôles : les joueurs peuvent accéder à une tablette virtuelle qu'ils peuvent utiliser pour accéder aux paramètres et même naviguer sur le Web, et bien sûr, il a une caméra avant et arrière pour selfies. Comme nous avons tous l'habitude d'utiliser nos smartphones, c'est un moyen intuitif d'accéder aux options de Somnium Space sans avoir recours à des systèmes abstraits gênants. Il était indispensable de faire un selfie, mais à cause des limitations de l'avatar, on ne peut pas sourire pour la caméra, seulement ouvrir la bouche quand on parle.
Cette escapade à Somnium Space est assez agréable, vous pouvez tuer le temps tout en discutant. Vous pouvez faire une bataille de boules de neige, aller jouer au bowling, manger un hot-dog virtuel dans un stand et grimper au sommet d'un immeuble (et d'en sauter). Lors d'événements particuliers, les foules se rassemblent pour écouter un acte musical ou assister à une conférence.
Mais il n'y a toujours pas grand-chose à faire ici, et la place principale est loin d'être animée. Il y a un grand potentiel, dans les terrains clôturés qui peuvent être achetés par les utilisateurs (et personnalisés pour construire leurs maisons), dans les magasins, les musées, et dans bien d'autres endroits avec des objets virtuels. Ces biens immobiliers virtuels privés peuvent même avoir leurs propres règles établies par le propriétaire. Récemment, Sominium Space a amassé plus de 65 000 $ grâce à la vente par Indiegogo de terrains et de biens virtuels.
Pour vous donner un aperçu de ce qui vous attend, un centre commercial virtuel contient quelques vitrines pour des marques bien connues qui se sont associées à Somnium Space : Sony et Tesla. Un magasin Sony Pictures vous offre la possibilité d'acheter des avatars de joueurs de Marvel Cinematic Universe, alors que dans le magasin Tesla, vous pouvez commander une voiture électrique.
Mais les créateurs de Somnium Space préparent une mise à jour 2.0 qui promet, entre autres, une refonte graphique pour ajouter plus de détails (ce qui doublera la taille du monde). Et même si la beauté n'est pas ce qu'il y a de plus important, elle compte quand-même pour beaucoup. Pendant les longs hivers, il est agréable de pouvoir partir dans un bord de mer virtuel et de regarder le coucher du soleil sur les vagues.
Quelle est la chose la plus intéressante que nous puissions trouver dans Somnium Space ? Probablement le téléporteur appelé Oasis qui rappelle un peu Star Trek (oui, comme dans Ready Player One). Cela permet de se téléporter non seulement vers d'autres endroits au sein de Somnium Space, mais aussi vers d'autres applications sociales VR distinctes, telles que High Fidelity et JanusVR.
L'objectif est que vous puissiez passer d'une app VR à une autre de manière relativement fluide en emportant avec vous certaines de vos préférences et paramètres. Il y aurait un "péage" pour l'utilisation de cette "autoroute", sous la forme de publicités diffusées pendant la transition.
Et la vie nocturne ?
Somnium Space est un endroit assez agréable pour flâner, jouer à des jeux simples ou regarder le système solaire dans le planétarium, mais c'est quand même un endroit réaliste et relativement bien établi. Après un après-midi dans la petite ville, j'ai donc décidé de faire la fête.
Pour cela, j'ai rejoint TheWaveVR, une plateforme sociale de VR conçue uniquement pour faire la fête. Une sorte d'espace où vous pouvez accéder à des boîtes de nuit et des émissions VR appelés Waves. Alors que Somnium Space tente un monde semi-réaliste, TheWaveVR se lance dans la cyberpsychédélie avec une belle esthétique néon-sur-obscurité rappelant celle de Tron.
J'habille mon avatar pour la vie nocturne, qui est encore une autre paire de manches (au sens propre du terme), mais c'est amusant puisque l'on peut choisir des têtes d'anime et d'aliens, ainsi que différentes formes de corps. De toutes façons , personne n'a l'air humain sous cet éclairage au néon.
WaveVR dispose d'un espace public rempli d'effets, de couleurs vives, de sons très forts. Vous pouvez collectionner des objets sphériques comme des "trips" qui, s'ils sont utilisés, enveloppent et transforment l'environnement autour de vous pendant une courte période, ou des "poppers", qui ne sont pas ce que l'on pourrait imaginer mais des objets qui produisent différents effets visuels pour s'exprimer.
Ces objets peuvent être donnés. Je suis allé plus loin, j'ai pris une pilule virtuelle donnée par un étranger. Nous avons partagé un trip, le monde autour de nous devenait un étrange et visqueux bain moussant pendant une minute. Rapide et gratuit.
Et les fêtes ? Il y a un programme régulier d'événements, live ou non, mais cela ne s'arrête pas là. Chaque joueur dispose d'un espace privé qu'il peut utiliser pour créer des soirées personnalisées, donc si vous êtes du type créatif, vous pouvez créer des soirées DJ selon vos propres goûts audiovisuels.
Quant aux fêtes, nous y trouvons un peu de tout mais ce qui est intéressant c'est qu'elles sont faites sur mesure avec de multiples éléments à l'esprit, pas seulement la musique. Par exemple, dans une Wave, vous pouvez voler au milieu d'une étoile, dans une autre vous vous téléportez entre les sommets des plateaux désertiques. Je dois admettre que j'ai été impressionné par le style et la mécanique du WaveVR. Il y a cependant un problème flagrant. En environ une heure d'exploration, j'ai rencontré trois personnes...
Le social, c'est bien. A plusieurs, c'est mieux !
Ne vous méprenez pas, trois personnes parfaitement sympathiques avec qui c'était amusant de parler, mais ce n'est pas vraiment la fête. De même, dans Somnium Space, j'ai repéré à peine un ou deux visiteurs qui ne faisaient pas partie de l'équipe. Cela ne veut pas dire que ces endroits n'ont pas de communauté mais il faut bien comprendre qu'on n'y trouve pas beaucoup de gens à qui parler. L'Oasis, Metavers où quel que soit le nom que l'on donne à l'univers virtuel, n'existe aujourd'hui que sous forme embryonnaire. C'est amusant mais il faudra attendre encore longtemps pour qu'il devienne un véritable centre d'interaction sociale..
La VR sociale est amusante et étonnamment facile d'accès. Nous sommes tellement habitués à des interactions numériques via clavier et souris (ou écran tactile) qu'au début on a l'impression de redécouvrir notre propre nature pour communiquer avec les corps virtuels. Mes premières expériences dans ce que j'appellerais la VR sociale sont positives, et il y a encore beaucoup d'univers que je n'ai pas explorés en détails comme VRchat pour n'en citer qu'un.
La plupart des plates-formes de ce type encouragent les utilisateurs à créer leurs mondes pour inviter des amis et des étrangers à y traîner, et c'est là que se trouve l'un des potentiels les plus intéressants.
Des casques autonomes comme l'Oculus Quest, qui permettent de découvrir facilement la réalité virtuelle, pourraient permettre de peupler ce "Metavers". Même dans mon cercle relativement geek d'amis, quasiment aucun ne pourrait s'y rendre avec moi car quasiment aucun ne possède un casque VR
Plus il y aura de monde, plus les choses deviendront intéressantes Et bien sûr, nous verrons également arriver tous les conflits que la fiction cyberpunk a imaginé : la monétisation, le contrôle des entreprises, l'évasion addictive, les questions de protection des données et la négligence potentielle de nos environnements dans le monde réel.
Il est difficile de ne pas être séduit par cette vision magique et de vouloir se retrouver tous ensemble dans une illusion partagée, et on peut dire que beaucoup des premiers développeurs sont de vrais rêveurs, travaillant à mettre en pratique l'inspiration et la passion que la fiction leur a insufflées. Il va cependant y avoir des questions difficiles que même les idéalistes devront affronter.
Nous avons déjà commencé notre voyage vers les contrées virtuelles, et il n'y a pas de retour en arrière sur l'avancement de la technologie. Jouer, discuter, construire, faire du shopping, faire la fête, tout cela est possible et devient de plus en plus sophistiqué avec le temps. Si les développeurs de mondes virtuels continuent à se connecter et s'il est dans leur intérêt d'éviter la fragmentation, le "Metavers" virtuel partagé est inévitable dans notre vie, alors il faut se poser cette question : à quoi voulons-nous que cela ressemble ?
Que pensez-vous de l'application sociale de la VR ?
"vivre " ingress en " vrai "
On à déjà notre gouvernement qui vie dans un monde virtuel... suis pas presser d'y aller même si cela débouche, je l'espère, sur des choses pratiques...
Bof, franchement ça ne me dit pas grand chose...
Déjà qu'il y en a qui confondent leurs rêves avec la réalité, alors là, ça va être beau...